FDLS 6 La colère d'un homme patient de Raùl arévalo

Colère sourde

On a tendance à affirmer que les films sont plus violents qu'avant. Ou en tout cas que la violence est plus graphique, ce qui est indéniable. Ce changement est en grande partie dû à l'arrivée du cinéma gore et de son renouveau dans les années 80. Une violence exagérée, parfois dérangeante, souvent spectaculaire qui ont marqué la rétine de réalisateur mondialement connu tel que Tarantino ou Nicolas Winding Refn. Est-ce que cela rend le cinéma plus violent dans son ensemble ? Certainement pas, par contre il est vrai que pour retrouver les premières sensations d'un cinéma gore depuis vulgarisé, la jeune génération de réalisateur doivent trouver d'autre moyen pour éprouver le spectateur. C'est dans ce cadre bucolique que la colère d'un homme patient vient poser sa pierre. C'est un thriller sombre dans lequel un ex taulard se retrouve convié malgré lui dans un sombre vengeance d'un monsieur tout le monde à bout de nerfs.
Avant de rendre son manteau à César me dois de découper un peu la couenne du film. L'intrigue souffre d'un sévère manque d'originalité, non pas que cela soit une condition sine qua none a la réussite d'une histoire, mais cela peut engendre deux trois problèmes. Le plus évident étant que passé les vingt premières minute le scénario cède à la facilité de la « kill list » a savoir trois noms qui devront être abattus et annonce trois scènes fortes que l'on voit venir à des kilomètres. A cela ajoutons une quasi-absence d'implants où de fausse ainsi qu'un retournement pas vraiment surprenant. En peu de termes, la tension souhaitée ne vient pas de l'intrigue. Tout se joue donc sur le traitement de l'image.
C'est ici que le réalisateur prouve qu'il a su penser a son public et plus précisément à sa posture dans la salle de cinéma. Car quand bien même il ne s'agit pas d'un huis clos, le spectateur se sent complètement étouffé et réduit dans un espace toujours plus petit. La séquence d'introduction nous donne le ton, il s'agit d'un braquage entièrement filmé en plan-séquence depuis l'habitacle de la voiture du chauffeur du gang. Et toute la construction du film repose sur cette mécanique d'enfermement progressif. Fait assez rare dans le cinéma, toutes les scènes où les personnages entrent dans des bâtiments n'est pas ellipse, mais filmé en caméra épaule. Il y a donc systématiquement un sas de pressurisation qui vient faire peser un poids croissant sur les épaules du spectateur. À cela, il faut préciser que les scènes de meurtre sont incroyablement étirées, non pas que le protagoniste ait un plaisir pervers à faire durer la souffrance de ses victimes, au contraire, il hésite, il tâtonne, il ne parvient pas à tout régler en un coup. Cette alchimie de l'étouffement est complétée par un montage qui laisse durer les plans et fait cette fois passer le spectateur dans une position de voyeur. La colère d'un homme patient est un film qui donne envie de s'agiter de son siège, comme pour vérifier que l'on n'est pas définitivement cloué par une caméra trop réaliste pour ne pas être agressive.
Enfin cet impressionnant travail est complété par celui fourni par les acteurs. Le film a l'instar d'un Samouraï de Melville, n'est pas vraiment bavard. Les acteurs ne parlent presque pas, ils font ressentir. Antonio de la Torre offre une performance assez impressionnante, il garde un visage de granit au quotidien, mais joue jamais les badass taciturne, il fait couler des larmes où tremble de peur sans jamais sur jouer. Il porte à lui seules huit années de colère accumulée et transforme son personnage en flacon de nitroglycérine atteint de parkinson.
En définitive La colère d'un homme patient nous démontre que l'originalité d'un film ne dépend pas toujours de son sujet, car à partir d'une histoire efficace mais convenu Raul Arevalo parvient à faire un film tendu, éprouvant au seul moyen d'une caméra posé prêt, trop prêt d'un homme à fleur de peau

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